Diversification Quelles options pour valoriser un excédent d’herbe ?
Avec l’instauration des aides bovines supérieures à l’UGB, les bœufs laitiers retrouvent un intérêt économique et s’avèrent l’option la plus rentable pour valoriser des excédents d’herbe à côté du troupeau laitier.
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Sur un territoire avec beaucoup de prairies permanentes présentes dans les assolements, les conseillers des chambres d’agriculture de Lorraine et de l’Institut de l’élevage, chargés du suivi des fermes du réseau Inosys, proposent régulièrement une actualisation de la hiérarchie des ateliers permettant de valoriser ces surfaces à côté du troupeau laitier en fonction de leur impact sur l’amélioration de l’EBE (voir le graphique ci-dessous).
« Ces simulations économiques visent à évaluer quelles sont les options les plus rentables pour valoriser des excédents d’herbe, après avoir au préalable constitué une sécurité fourragère nécessaire dans le contexte climatique actuel », explique Jean-Marc Zsitko, conseiller au service économie d’élevage à la chambre de Meurthe-et-Moselle.
Les aides Pac à l’UGB relancent l’intérêt du bœuf
Précisons d’abord que, pour établir cette hiérarchie, les conseillers ont retenu une conjoncture de prix moyenne – celle utilisée dans les études d’installation – afin de lisser les situations extrêmes et de mieux juger de la rentabilité d’une production à moyen terme. « Avec un lait à 400 €/1 000 litres, la hausse du contrat de livraison avec sa laiterie reste économiquement plus rentable que la mise en place d’un atelier viande, rappelle le conseiller. Mais attention, l’augmentation de la production doit s’analyser au cas par cas, en fonction des disponibilités en bâtiments et en main-d’œuvre. »
Parmi les ateliers permettant de valoriser des surfaces en herbe excédentaires, le choix d’élever des génisses laitières, au-delà des besoins de renouvellement, devient moins rentable. D’une part, le marché de la génisse pleine n’est pas porteur, alors que les autres productions bénéficient de la hausse du prix de la viande. D’autre part, l’instauration des aides bovines supérieures pour les UGB viande (99 €/UGB) relance l’intérêt économique de l’élevage des mâles destinés à la production de bœufs laitiers. Ils ont l’avantage d’être complémentaires de l’atelier lait en raison d’une moindre charge de travail et de faibles exigences de logement. « Grâce à une plus forte hausse des cours de ce type de viande et à une conduite d’élevage économe, ces animaux dégagent même un EBE légèrement supérieur à celui des vaches allaitantes. » Compte tenu du prix des concentrés, la conduite des bœufs jusqu’à 36 mois avec une alimentation alternant pâture + foin se révèle plus rentable qu’à 28-30 mois : un bœuf tardif valorise 1,2 ha d’herbe pour son alimentation, contre 0,8 ha pour les bœufs plus précoces ; mais, plus l’âge à l’abattage diminue, plus il faut apporter de concentré et prévoir de places en bâtiments. En outre, les bœufs tardifs commercialisés de juillet à novembre bénéficient souvent d’un prix de vente plus élevé (365 kg à 3,70 €/kg) que les bœufs précoces vendus en fin d’hiver (370 kg à 3,55 €/kg) en même temps que les taurillons. La mise en place d’un troupeau allaitant là où il y a beaucoup de prairies permanentes se justifie dans les exploitations sociétaires où il y a assez de place en bâtiment pour engraisser les mâles des deux troupeaux en taurillons.
La bonne rentabilité de la production d’agneaux d’herbe
L’écart de rentabilité avec les bœufs est faible, mais les vaches allaitantes réclament plus de technicité, de temps de travail et d’exigence en matière de logement. Autre option, l’achat de broutardes en vue de produire des génisses de race à viande. La rentabilité se situe légèrement en dessous des vaches allaitantes, mais il s’agit d’une production très spéculative. Sans parler des risques sanitaires liés à l’achat d’animaux à l’extérieur. L’achat de broutards de race à viande pour la production de bœufs à viande devient économiquement plus intéressant, grâce une fois encore à des aides bovines supérieures à l’UGB. « Une production qui pourrait s’avérer encore plus rentable dans le cadre de circuits courts. »
Au regard d’un plus faible capital engagé que celui des vaches allaitantes et des besoins restreints en bâtiments, les brebis en système d’agneaux d’herbe (19 kg carcasse à 7 €/kg) valorisent les prairies permanentes avec une bonne rentabilité. L’élevage ovin est cependant un métier à part entière qui requiert de la disponibilité et une bonne maîtrise technique. Il peut être intéressant dans les exploitations sociétaires où l’un des membres souhaiterait s’investir dans cette production. La complémentarité des ateliers peut alors permettre de développer une troupe de brebis en misant sur une conduite très économe d’animaux capable de valoriser le pâturage hivernal lorsque la portance des sols est insuffisante pour les bovins. À titre d’exemple, dans une exploitation laitière, si l’on remplace une trentaine de bœufs holsteins vendus à 36 mois, qui valorisent une quarantaine d’hectares de pâtures, par 330 brebis en système d’agneaux d’herbe, on va améliorer l’EBE de l’exploitation de 10 000 €, soit environ 30 €/brebis.
La vente de foin… tentante, mais risquée
Enfin, en raison de l’augmentation du prix de la viande, la vente de foin bottelé devient économiquement moins intéressante. Compte tenu d’une charge de travail moins importante, elle présente néanmoins un certain attrait, même si le résultat est aléatoire : lors d’une année climatique normale, l’offre est nettement supérieure à la demande et la rentabilité pas toujours au rendez-vous. Selon les simulations des conseillers, la production de foin devient plus intéressante que celle des génisses de race à viande et des vaches allaitantes, respectivement au-delà de 90 et 92 €/t ; lorsque le foin est vendu à plus de 100, 101 et 107 €/t, ce sont alors les bœufs holsteins de 30 mois, puis les bœufs de race à viande et les bœufs holsteins de 36 mois qui ne sont plus intéressants. Enfin, pour égaler la rentabilité des brebis, le foin devra être vendu à plus de 154 €/t. « Ces calculs restent très théoriques, prévient Jean-Marc Zsitko. Car l’arrêt de ces ateliers animaux au profit de la vente de fourrage engendrerait des surfaces de fauche très importantes, dans des prairies permanentes parfois difficiles d’accès. »
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